Jerome Bloch (360Crossmedia) : tendances 2023 en communication
Depuis l’élection de Donald Trump, les fakes news envahissent les médias de manière décomplexée et la propagande de la guerre en Ukraine n’arrange rien. Selon Jerome Bloch, CEO de 360Crossmedia et auteur du livre ‘No Bullshit’, « notre époque impose à la communication d’entreprises des méthodes de plus en plus sophistiquées ». Interview.
Comment analysez-vous l’évolution actuelle de la communication ?
Le premier mot qui me vient à l’esprit, c’est « Orwellien » : l’information devient totalitaire sous toutes ses formes. Il ne s’agit plus d’informer mais de soumettre ou a minima de manipuler, et il n’est pas rare d’écouter deux avis radicalement différents sur un sujet précis sans avoir la moindre idée de qui dit la vérité. Ceci crée évidemment énormément d’anxiété. Nos sociétés, aussi imparfaites soient-elles ont été bâties autour de liens de confiances qui sont rompus à une vitesse vertigineuse jamais vue dans l’histoire. Nous sommes passés en 20 ans de Gutenberg à Zuckerberg, puis à Heisenberg : encore récemment, pour être publié, il fallait passer par un éditeur qui servait de garde-fou depuis l’invention de l’imprimerie en 1454 par Johannes Gutenberg. En 2004, la création de réseaux sociaux comme facebook, donna une voix à chacun, notamment grâce à son créateur Mark Zuckerberg. Mais depuis l’élection de Donald Trump en 2016, la fin semble justifier les moyens, comme dans le film « Breaking Bad » où Walter White, le prof de chimie devient un roi de la drogue sous le pseudonyme « Heisenberg ». Le résultat : le principal moteur de la communication devient le divertissement, et le public semble accepter de renoncer à son besoin sociétal de vérité universel pour profiter du spectacle, se contentant au passage d’une vérité grégaire partagée par un petit groupe.
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« L’information devient totalitaire sous toutes ses formes. »
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Quelles solutions recommandez-vous aux entreprises ?
J’en connais uniquement deux : présence et pertinence. La question de la présence ne se pose plus. Aujourd’hui, toute entreprise doit communiquer au minimum une fois par mois avec un article ou une vidéo et une fois par semaine sur les réseaux sociaux. Considérez ceci comme une assurance réputationnelle, car il est très facile aujourd’hui de dénigrer sur internet, avec des dégâts souvent importants, sachant que les régulateurs par exemple sont branchés 24 heures sur 24. Une présence régulière permet d’occuper le terrain et de créer des liens avec les journalistes et les influenceurs. Ces relations peuvent s’avérer précieuses en cas d’attaque fallacieuse. Une fois la présence établie, la pertinence s’obtient en travaillant le fond et la forme. Je cite souvent Jean-Claude Biver qui fut notamment le CEO de Hublot, qui m’avait confié que le succès des montres de luxe avait débuté lors de la création des montres à quartz : le jour où tout le monde a pu s’offrir cet objet, les montres de qualité ont vu leur valeur augmenter. La même dynamique s’applique aujourd’hui aux contenus : il ne suffit pas de poster sur Linkedin pour toucher sa cible. Il convient de créer des formats courts, engageants, de très haute qualité. Je pense à des e-conférences, des interviews de 20 minutes avec des experts charismatiques, des white papers ou des livres. HSBC a marqué les esprits l’an dernier avec son concept ESG Square décliné sous forme de site internet, de conférence et de livre par exemple.
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« Nous sommes passés en 20 ans de Gutenberg à Zuckerberg, puis à Heisenberg. »
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Quels conseils pour les individus ?
Dans mon livre « No Bullshit », j’explique le travail que représente une saine recherche des vérités universelles. Chacun a le choix de bêler avec son troupeau ou de construire patiemment un compas moral ; de regarder une série Netflix en 120 épisodes ou de lire des livres et des sites internet bien choisis pour trier le vrai du faux. Chacun est libre de faire ce qu’il veut de sa vie et de chercher son bonheur comme il le souhaite. Mon passé de sportif de haut niveau m’a toutefois appris une leçon essentielle : « Le plaisir immédiat entraîne des souffrances futures, et inversement ». Quant à la tentation omniprésente du complotisme, souvent synonyme d’anxiété destructive, je reste toujours fidèle à Bertrand Russell : « Love is Wise , Hatred is foolish ». (L’amour a raison. La haine perd la raison). Nous devons maintenir la confiance envers nos semblables, malgré les tentations ambiantes.
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